Les modalités générales d’une rupture conventionnelle
La rupture conventionnelle, souvent privilégiée par les salariés souhaitant quitter leur emploi, est une procédure permettant à un salarié en CDI et son employeur de convenir d’un commun accord des modalités de rupture du contrat de travail. Si on pense le plus souvent à une rupture conventionnelle dite « individuelle », la rupture conventionnelle dite « collective » existe et est toujours de l’initiative de l’employeur. Dans les deux cas, la convention de rupture doit être rédigée et obligatoirement validée par la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (ex-Direccte). Dans les grandes lignes, la rupture conventionnelle représente le seul moyen de rompre le contrat à l’amiable, au contraire du licenciement, et prévoit des indemnités de rupture pour le salarié, ainsi que des allocations de chômage sous certaines conditions.
Il peut y avoir un ou plusieurs entretiens précédant la mise en place de la rupture conventionnelle, et chacun des partis peut se faire assister par un représentant du personnel ou un membre d’une organisation syndicale ou association, à partir du moment ou l’autre parti en est informé. Pas besoin d’avocats pour assurer la médiation entre les deux parties, même si cela est tout à fait possible, surtout en cas de conflit important. Lors de cet entretien, est rédigée la convention et son contenu. C’est alors que sont fixées les conditions de la rupture du contrat, telle que la date de rupture (au plus tôt au lendemain du jour de l’autorisation de l’inspecteur du travail) et le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle.
Les conditions d’exécution de la rupture conventionnelle
Le critère indispensable : le commun accord des parties
L’employeur et le salarié sont les deux parties concernées par la rupture conventionnelle, et c’est eux qui peuvent convenir en commun de la rupture du contrat de travail. L’employeur seul ne peut jamais imposer une rupture conventionnelle au salarié, de même que le salarié ne peut l’effectuer seul.
Les cas d’interdiction de la rupture conventionnelle
La rupture conventionnelle individuelle est proscrite dans les cas suivants :
- Elle a été conclue dans des conditions frauduleuses ou en l’absence d’accord conclu entre le salarié et l’employeur ;
- Elle est proposée dans le cadre d’un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) ou d’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ;
- Elle est proposée dans le cadre d’un accord collectif portant rupture conventionnelle collective ;
- La procédure de rupture conventionnelle vise à contourner les garanties prévues pour le salarié en matière de licenciement économique ;
La rupture conventionne peut être annulée par le conseil de prud’hommes (CPH) si le salarié établit qu’elle a été signée alors que son consentement n’était pas libre, par exemple dans un contexte de harcèlement moral ou s’il a subi n’importe quel type de pressions. Dans ce cas précis, lorsqu’il est établi que la rupture conventionnelle a été forcée, le salarié peut percevoir des indemnités car il s’agit alors d’un licenciement injustifié (sans cause réelle et sérieuse).
Le déroulement d’une rupture conventionnelle
Une rupture conventionnelle se déroule le plus souvent au moyen de plusieurs entretiens. Ces derniers permettent de définir les conditions de la rupture, tel que le montant de l’indemnité versée par l’employeur, la date de la rupture, s’il y a un préavis à effectuer ou non. Ces conditions doivent être impérativement établies.
Convocation à un ou plusieurs entretiens
C’est la première étape de la rupture conventionnelle : l’employeur et le salarié doivent se réunir lors d’au moins un entretien. Les conditions de la convocation telles que la date, l’heure et le lieu sont librement fixées entre les deux parties.
L’assistance de l’employeur et du salarié
Les deux parties peuvent se faire assister lors de chacun des entretiens. Un salarié pourra être accompagné par un représentant du personnel, lui aussi salarié de l’entreprise, ou u conseiller du salarié en son absence. Le salarié a tout simplement à en informer par écrit ou à l’oral l’employeur avant l’entretien.
L’employeur, comme le salarié, peut aussi tout à fait se faire assister lors du ou des entretiens. Il peut choisir la personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, ou bien encore un membre de son organisation syndicale d’employeurs (ou par un autre employeur relevant de la même branche, si l’entreprise emploie moins de 50 salariés). Là encore, l’employeur doit informer le salarié avant l’entretien qu’il a l’intention de se faire assister.
La rétractation prévue dans le cadre de la rupture conventionnelle
Comme il s’agit d’une procédure qui est loin d’être prise à la légère, et que doivent être protégés aussi bien l’employeur que le salarié, la rupture conventionnelle prévoit un délai de rétractation, de même durée et aux mêmes conditions pour chacun des deux partis. Le délai de rétractation est ainsi de quinze jours calendaires, ce qui veut dire que chaque jour compte, tels que les dimanches et les jours fériés. Si par chance le délai de rétractation se termine un samedi, dimanche ou jour férié, le délai est néanmoins repoussé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
Comment exercer son droit de rétractation ?
Pendant ces quinze jours, le salarié comme l’employeur peuvent décider d’annuler la rupture conventionnelle par le biais de l’exercice de leur droit de rétractation. Le salarié ou l’employeur doit dans ce cas adresser un courrier de rétractation à l’autre parti. Il n’existe pas de formulaire type, et cette lettre ne doit pas nécessairement suivre un modèle particulier, mais doit toutefois comprendre les informations suivantes :
- La signature du parti qui formule la demande ;
- Les informations du salarié permettant de l’identifier clairement ;
- Le souhait du salarié ou de l’employeur d’exercer son droit de rétractation suivant les dispositions prévues par l’article L. 1237-13 du Code du travail ;
- La date de signature de la convention ;
- Une formule de politesse.
Si toutefois vous souhaitez écrire un courrier de rétractation pour votre rupture conventionnelle et que vous ne savez pas comment rédiger son contenu, vous trouverez des modèles disponibles facilement sur internet, notamment sur le site du gouvernement.
L’expéditeur peut décider de faire parvenir son courrier de rétractation par différents moyens :
- Par e-mail ;
- Par lettre recommandée avec accusé de réception ;
- Par remise en main propre de la lettre, contre décharge.
C’est la date d’envoi du courrier de rétractation qui prévaut, et non la date de réception, dans le cas où un contretemps logistique jouerait en défaveur de l’employeur ou du salarié. Dans le cas où l’un des deux partis exerce son droit de rétractation, la rupture conventionnelle est ainsi annulée et le salarié peut continuer à travailler au sein de l’entreprise sans risquer de pénalités. Le contrat de travail reste inchangé sur le point juridique. Si l’un des deux partis avait le souhait d’annuler la rupture conventionnelle, mais ne l’a pas fait pendant le délai de rétractation prévu à cet effet, alors il n’est plus possible d’annuler la demande par un simple recours.
Que se passe-t-il après le délai de rétractation ?
Une fois les quinze jours du délai de rétractation révolus, et si aucun des deux partis n’a souhaité rompre la rupture conventionnelle, l’étape qui succède est celle de l’homologation. Le salarié ou l’employeur peut, dès le lendemain du dernier jour du délai de rétractation, formuler la demande d’homologation de la rupture conventionnelle auprès de la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités. La direction possède ensuite un délai de quinze jours également pour répondre à la demande, et homologuer la rupture ou en délivrer le refus.
Pendant ce délai, ni le salarié ni l’employeur ne peut se rétracter. La seule possibilité pour annuler la rupture conventionnelle une fois le délai de rétractation expiré revient aux mains de la Direction régionale, qui peut décider de ne pas homologuer la rupture dans certains cas spécifiques (absence d’une ou de plusieurs signatures, absence des renseignements relatifs aux salaires, à l’indemnisation, etc). Il faut néanmoins savoir que si à l’issue des quinze jours du délai d’homologation la Direction n’a pas fourni de réponse explicite, comme il arrive très souvent du fait du grand nombre de demandes qu’elle reçoit, la rupture conventionnelle est considérée comme homologuée. La rupture du contrat a alors lieu à la date fixée par les deux parties, et il n’est plus possible de revenir en arrière.
L’annulation de la rupture conventionnelle peut cependant être prononcée si et seulement si un vice du consentement est caractérisé. La Cour de cassation rappelle cette mention dans son arrêt en date du 23 janvier 2019 en précisant que la seule existence d’un harcèlement moral au moment de la conclusion de la rupture ne saurait conduire à sa nullité. Il faut qu’un vice du consentement fasse défaut pour que la rupture conventionnelle soit frappée de nullité (Cass., Soc., 23 janvier 2019, n° 17-21.550).
La validation de la convention de rupture du contrat
Si aucun des deux parties n’a exercé de rétractation dans le délai prévu, la convention doit être adressée à la Dreets (Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (ex Direccte). La procédure de validation de la rupture varie cependant selon si le salarié est considéré comme protégé ou non.
Le cas général
L’un des deux parties adresse alors une demande de validation de la convention de rupture soit directement en ligne en utilisant le téléservice TéléRC, ou en remplissant le formulaire cerfa n°14598 de demande d’homologation de la rupture conventionnelle, qui doit ensuite être adressé à la Dreets.
Cet organisme dispose ensuite d’un délai de 15 jours ouvrables pour vérifier la validité de la convention. Si aucune réponse n’est apportée pendant ce laps de temps, la convention est automatiquement homologuée. En cas de refus, la Dreets devra donner des justifications sur sa décision.
Le cas d’un salarié protégé
La validation de la convention de rupture qui concerne un salarié protégé est un peu différente. En effet, ce n’est pas l’homologation de la Dreets qui est nécessitée mais l’autorisation de l’inspecteur du travail. Ce dernier doit s’assurer de la liberté de consentement des deux parties, en vérifiant tout particulièrement qu’aucune pression n’a été exercée en lien avec le mandat du salarié protégé.
A l’inverse de la Dreets, qui si elle ne donne pas de nouvelles sous les deux semaines la demande est considérée comme validée, dans le cas d’un salarié protégé si l’inspecteur du travail ne répond pas sous un délai de deux mois, la demande d’autorisation est considérée comme rejetée.